À qui profite la méconnaissance du droit local alsacien mosellan ? (1)
Nous savons tous que « Nul n’est censé ignoré la loi et nul ne peut s’y soustraire » mais aussi que « les droits de la défense doivent être respectés ».

Pourtant, l’administration centrale française est ignorante en matière de droit local. Une sénatrice d'Alsace a même proposé que les collectivités territoriales qui ne connaissent pas plus le droit local, pouvaient se tromper et de leur reconnaître un droit à l'erreur.

Notons ici que ce droit n’est plus enseigné depuis plus de 100 ans ! (Pourquoi ?) Les Alsaciens-Lorrains y sont pour beaucoup soit indifférents, car ils ne voient pas d’incidence pratique, soit attachés à ce qui est, pour eux, un patrimoine régional. Cependant, la majorité d’entre eux ne connaissent que peu ou pas du tout le droit local pourtant en vigueur.
Que ce droit ne soit plus enseigné pose problème :
- De nombreuses professions juridiques (avocats, notaires, magistrats, etc.) sont fortement impactées par ces lacunes.
- S’il n’y a plus de diplômes, et plus de diplômés, comment relancer l’enseignement et le certifier par un diplôme ?
Depuis 2023, l’enseignement que peuvent suivre les juristes est limité à des applications pratiques ; les cours magistraux, qui permettraient de comprendre les rouages de ce droit, sa base, sont inexistants. C’est l’IDL (voir article pour se faire une idée) qui en est le centre névralgique. Un code a été rédigé mais son contenu ne peut pas être validé. En effet, il paraît compliqué de faire valider un code rédigé par l’Institut de droit local car il n’existe pas de « personne compétente » et que la seule référence à laquelle se rapporter est justement l’Institut de droit local.
Paradoxalement cet Institut n'est qu'un gestionnaire de bibliothèques et d'archives.
Les tribunaux et notaires sont fortement impactés par l’inexistence d’un cursus de formation et ne peuvent que s’en remettre à l’IDL. Cette aberration a été dénoncée par la préfète Josiane Chevalier :

Signe de la méconnaissance, en 2012, en 14 jours, la chancellerie a émis un décret (n°2012-783 – 30/05/2012) de 60 pages et une annexe de 464 articles.
L’article R.534-1 de ce décret concerne les procédures civiles d’exécution dans les départements d’Alsace-Lorraine, et se réfère à deux décrets des 18 novembre 1924 relatif à la tenue du livre foncier et 14 janvier 1927. Seulement voilà : ces deux décrets ont été abrogés en 2009 !
Le 21 janvier 2025, la présidence de l’Assemblée nationale enregistre le dépôt de loi n° 823. La proposition est déposée par Mme Louise Morel (députée du Bas-Rhin) et M. Nicolas Turquois (député de la Vienne).
La proposition de loi de loi vise à étendre le principe de la voie de juridiction gracieuse prévue par la loi «civile» très spéciale du 1er juin 1924.
Le but est de supprimer la possibilité d’un recours concernant un partage concrétisé par une procédure amiable. Attention, qui dit partage amiable ne dit pas consentement de toutes les parties.

Les lois originelles, respectivement prussienne et allemande, des 22 mai 1887 et 14 juin 1888 concernaient la procédure de partage et vente judiciaire d’immeubles et remplaçaient la loi française en Alsace-Lorraine. Elles se voulaient simplifier la procédure de partage en la rendant plus efficace, moins onéreuse et plus proche du justiciable. Elles visaient le partage et permettaient l’appropriation des biens de ceux qui ne revenaient pas de la guerre ou qui résistaient pour ne pas être spolié.
Notons :
- Cette proposition de loi suit les messages d’alerte du président de la République et Premier ministre concernant une possible entrée en guerre.
- Cette voie gracieuse se réalise sans débat public et sans publicité. Les partages se décident donc pour ainsi dire secrètement.
- Les parties absentes lors du partage sont présumées consentir au partage qui deviendra obligatoire pour eux.
Les intérêts de ce projet de loi se présentent comme un facilitation de la mobilité foncière, la résolution de conflits familiaux, un délestage des organes de justice, etc..
Mais en coulisses, les intérêts pourraient être tout autre.
En Alsace-Moselle, la combinaison des procédures notariale et civile s’avèrent scélérates. En effet, la procédure civile est en totale contradiction avec les règles du procès équitable, prévue par la Convention européenne des Droits de l’Homme. La Cour d’Appel de Colmar le confirme en ces termes : « une procédure spéciale qui consiste à arriver à un partage malgré l’absence, l’abstention ou la résistance de la partie intéressée. »
Cette procédure n’est pas moins coûteuse car si l’on supprime les frais d’avocats, ils sont remplacés par des frais de notaire.
Cette procédure est la porte ouverte aux spoliations et le vote de cette loi représenterait le début d’une introduction du Reich allemand, dans le droit français.
Le fait n'a rien d'étonnant puisqu'un parlementaire alsacien-mosellan peut être considéré comme en emploi fictif agissant pour le compte du Reich allemand. (article 16 du dossier Droit local)
Cette proposition de loi est-elle présentée en raison d'une guerre à venir ? La question est légitime au regard des deux études citées en bas de page, mais également au travail de Me Virginie de Araújo-Recchia, dans son livre La France sacrifiée ? Réarmement et programmation militaire 2024-2030 (voir article ici).

Le présent article est un résumé des deux études détaillées suivantes :
Jean-Luc Filser
(1) Erratum: Le titre contient une erreur. Le texte 863 constitue une proposition de loi et non un projet de loi, puisqu'il émane de députés. La dénomination projet de loi est réservée au gouvernement.