SOS Éducation : quand le passé prouve le futur

Le Dr Ariane Bilheran, lors de nombreuses interventions sur sa chaîne YouTube, Le fil d'Ariane, recommande aux internautes de toujours se renseigner sur les prises de position des « experts » promus par les médias de masse en allant regarder ce qu'ils faisaient vingt ans auparavant. Nous pensons donc utile de remettre sous la lumière des projecteurs un communiqué de presse du 3 novembre 2006 « à propos de SOS Éducation » (il y a donc 19 ans) qui avait alors été cosigné par les association Reconstruire l'école, Sauver les lettres, et Sauver les maths, dont l'un d'entre nous était proche. Nous ferons ensuite quelques commentaires.
Communiqué de presse à propos de SOS Éducation du 3 novembre 20061
par Reconstruire l'école, Sauver les lettres, Sauver les maths
Source primaire : http://www.re2.freesurf.fr/Actions/commsos.html
Source secondaire : http://michel.delord.free.fr/soseduc-critiqueantipedago.pdf
Archives d’internet : https://web.archive.org/web/20071121154541/http://www.re2.freesurf.fr/Actions/commsos.html
Les associations signataires de ce communiqué commun mènent depuis de longues années une lutte sans concessions pour un enseignement de qualité dans une école ouverte à tous. À l'heure où nos idées commencent à percer dans l'opinion, nous aimerions éviter que des mesures maladroites, émanant d'un ministère plus ou moins bien intentionné, aboutissent à des résultats contre-productifs. Nous ne tolérerons pas que notre combat soit dévoyé par le groupuscule malfaisant qui se cache sous l'étiquette de SOS Éducation.
Nous rappelons d'abord qu'il convient de distinguer entre programmes et méthodes pédagogiques. Au-delà des querelles sur la lecture, nous préconisons une refonte totale des programmes depuis le primaire jusqu'au lycée, pour aboutir à des contenus d'enseignement riches, progressifs et cohérents, dans toutes les disciplines et sur l'ensemble de la scolarité. Un tel objectif suppose que soient fournies aux élèves les bases indispensables en français et en mathématiques. Nous exigeons d'abord le retour à un apprentissage systématique de la grammaire et de l'orthographe et l'abandon des « séquences » où tout se mélange et dont rien ne survit. Nous exigeons aussi que la littérature fasse l'objet d'un enseignement spécifique, fondé sur l'étude approfondie des œuvres au lieu de les subordonner à un inventaire techniciste de catégories prédéfinies. En mathématiques, l'école primaire doit apporter les bases du calcul et de la géométrie plane et la rigueur des démonstrations doit être réintroduite dès le collège. De plus, des filières clairement définies doivent être rétablies à partir de la seconde et les différents baccalauréats généraux donner à leurs lauréats les connaissances nécessaires pour accéder à l'enseignement supérieur. La terminale S ne doit plus être le refuge des meilleurs élèves, qu'ils se destinent ou non à des études scientifiques : les lettres, les mathématiques, les sciences expérimentales et les sciences sociales sont d'égale dignité et méritent le même traitement dans le cadre de baccalauréats profondément rénovés.
Dans le cadre de ces nouveaux programmes, la liberté pédagogique des professeurs doit être totale : ni le ministère, ni l'inspection n'ont à dicter leur loi en la matière, pas plus que les nouveaux « conseils pédagogiques ». Cela étant, cette liberté ne peut s'exercer dans le vide : nous exigeons que les différentes méthodes d'apprentissage soient enseignées dans les IUFM d'une façon claire et non biaisée et que les manuels correspondants se trouvent dans tous les centres de documentation. Chaque professeur se déterminera ensuite, librement, en fonction des connaissances à transmettre, de sa propre expérience et de la réalité de ses classes. C'est sur la seule base des résultats obtenus que son travail devra être évalué par l'inspection.
Pour terminer, nous dénonçons avec la plus grande vigueur les méthodes et les objectifs de SOS Éducation. Cette association a engrangé des moyens financiers considérables en copiant la recette d' « Avenir de la Culture », émanation française d'une secte internationale de catholiques intégristes, « Tradition-Famille-Propriété », qui fut mise au ban par l'épiscopat pour avoir voulu assassiner le pape Jean-Paul II, trop « laxiste » à son goût. Les 64 000 adhérents dont se prévaut SOS Éducation sont, pour la plupart, les victimes d'une opération de publipostage massif et ciblé : les premiers « dons » ont été recueillis auprès de grands-mères inquiètes de l'ignorance et de la « dépravation sexuelle » de la jeunesse. Une telle façon de procéder, bien décrite dans un rapport de l'Assemblée nationale à propos d' « Avenir de la culture », a vocation à multiplier géométriquement le produit des dons et permet à l'association de toucher un nombre toujours plus grand de parents. Sur la base d'affirmations tronquées ou mensongères, SOS-Éducation les invite alors à participer à de faux « référendums », lance des campagnes d'intimidation contre diverses maisons d'édition, exerce des pressions incessantes et de toutes natures auprès des pouvoirs publics, des élus, des responsables politiques, des journalistes et des familles conformément, là aussi, aux techniques déjà bien rodées d' « Avenir de la Culture ». Se contentant de voler sur nos propres sites Internet des informations et des analyses qu'ils sont bien incapables de produire eux-mêmes et qu'ils déforment pour les adapter à leur mauvaise cause, les dirigeants de SOS Éducation ambitionnent aujourd'hui de passer pour le fer de lance d'un renouveau de l'école tout en engageant, sous le prétexte de réaliser un sondage sur les manuels de lecture, une véritable campagne d'appel à la délation des instituteurs « non-conformes ».
SOS Éducation n'entend nullement remettre l'École publique sur les rails. En créant la confusion dans l'esprit des parents, en les dressant contre les professeurs, elle orchestre, en réalité, sa destruction dans le seul but d'imposer sa propre « solution » : le démantèlement de l'éducation nationale au profit d'écoles privées financées par le « chèque éducation ». SOS Éducation s'inscrit ainsi dans cette nébuleuse d'associations rassemblées autour d'une prétendue « Révolution bleue » pour construire en France un pôle d'extrême-droite ultralibérale. Rien ne saurait être plus éloigné de notre propre conception d'une École de qualité, publique, laïque et gratuite.
1Quelques erreurs typographiques ont été corrigées par rapport à la version d’origine.
Commentaires :
On pourrait s'interroger sur la pertinence d'une expression telle que « secte internationale de catholiques intégristes » à propos de l'association « Avenir de la Culture ». Nous n'avons d'ailleurs pas enquêté sur cette association, mais les conditions dans lesquelles le parti Civitas a été récemment dissous montre qu'aujourd'hui, si intégrisme il y a, c'est surtout celui des tenants d'une laïcité de plus en plus intolérante qui n'est, bien souvent, que l'autre nom de la cathophobie primaire. S'agissant de la religion catholique, l'intégrité est souvent promptement assimilée à de l'intégrisme.
D'autre part, le concile Vatican II, une sorte de « 1789 dans l'Église », ayant mis en place, selon Alain Pascal, un « faux catholicisme pour remplacer le vrai », on peut comprendre que Jean-Paul II fût considéré comme un pape laxiste, étant comparé, par exemple, à Léon XIII ou Saint Pie X.
Cependant, le mérite de ce communiqué de presse est de montrer qu'à SOS Éducation, un certain nombre de choses n'ont pas changé :
- le brassage de gros sous ;
- la mise en place d'actions leurres ;
- le plagiat du travail des véritables experts.
Nous renvoyons aux passages du communiqué ci-dessus mis en gras par nos soins.
Remarquons également que si d'un côté, l'association SOS Éducation revendiquait 64 000 adhérents, aujourd'hui, la pétition contre les nouveaux programmes de l'école primaire élaborés par la Commission Joutard, mise en ligne en 2001, l'année même de la création de SOS Éducation, n'a recueilli, au fil des années, que 2 849 signataires en France !
Cette pétition avait été rédigée, promue et signée, notamment, par des figures de proue et de nombreux membres des associations Reconstruire l'école, Sauver les lettres, et Sauver les maths.
Parmi les signataires, on trouve un certain... Jean-Claude Bilheran. Étonnant, non ?
Résumons donc :
- en 2006, SOS Éducation torpillait les actions de RÉ, SLL, et SLM pour invisibiliser la pétition primaire de 2001, signée par Jean-Claude Bilheran ;
- en 2025, SOS Éducation torpille les actions des Parents en colère et de l'Onest pour invisibiliser leur combat contre le programme Évars, dont la nocivité et l'illégalité ont été établies par le Dr Ariane Bilheran et Me Virginie de Araújo-Recchia.
Finalement, tout est cohérent. Et en rapprochant le présent du passé, il apparaît que l'association SOS Éducation a toujours été du mauvais côté de l'histoire.
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